À partir du XVIe siècle, la consommation de sucre explose en Europe, en grande partie grâce à l'apparition de ces curieuses boissons exotiques que sont le thé, le café et le chocolat. Le sucre quitte les officines des apothicaires pour les boutiques des épiciers.
Le chocolat, boisson mexicaine
Le chocolat, dans sa forme originale, est une boisson mousseuse, épaisse et amère élaborée par les Aztèques. Les Espagnols qui le découvrent suppriment le piment pour y substituer du sucre. Ils l’adoptent très vite et à la fin du XVIe siècle, nul ne saurait s’en passer à la cour d’Espagne.
En France, il semblerait que ce soit le frère de Richelieu qui en fit le premier usage pour "modérer les vapeurs de sa rate". Mais son succès est dû essentiellement à Marie-Thérèse d’Autriche (1638-1683), l’épouse espagnole de Louis XIV qui le diffuse parmi l’aristocratie. En 1671, Mme de Sévigné écrit à sa fille : "Vous ne vous portez pas bien, le chocolat vous remettra." En 1684, un médecin conclut que "le chocolat bien fait est une invention si noble qu’il devrait être la nourriture des Dieux, plutôt que le nectar et l’ambroisie".
Le thé, venu de Chine
Si les Portugais sont les premiers à goûter au thé et à le rapporter en Europe en 1610, ce sont bien les Anglais qui se l’approprient et en font très vite leur boisson nationale. Des bateaux plus rapides (les clippers) sont spécialement créés pour que les précieuses cargaisons ne souffrent pas du voyage. Même les paysans en boivent comme en témoigne François de La Rochefoucauld en 1784 : "On le prend deux fois par jour... Le sucre ou la cassonade qui est nécessaire en grande quantité et qui est fort cher n’empêche pas que cet usage ne soit général sans aucune exception".
En France, le thé apparaît vers 1640 mais son succès reste limité. Jugé dangereux par les médecins, il est surtout rare et cher. Il faudra attendre l’anglomanie de la fin du XVIIIe siècle pour qu’il soit admis, modestement.
Café, originaire d’Afrique
Originaire d’Ethiopie et du Yémen, le café se répand dans tout le monde musulman à partir du XVe siècle. Les voyageurs européens commencent à en parler. Il débute sa carrière européenne à Venise en 1570, atteint la Hollande, l’Allemagne et l’Angleterre où la bonne société l’adopte avant de succomber aux charmes du thé. En 1644, des négociants marseillais en rapportent, mais le café n’est vu que comme une bizarrerie de voyageur. On le considère comme un médicament, voire comme un aphrodisiaque mais sa couleur noire, jugée infernale, rebute.
Une circonstance "extraordinaire" va modifier quelque peu l’image du café en France : le séjour en 1669 à Paris d’un ambassadeur du sultan de l’Empire Ottoman Mehmed IV. Soliman Aga a l’habitude d’offrir du café. L’attrait pour l’Orient et l’exotisme en vogue à la cour du Roi Soleil vont alors profiter au café.
Très vite on voit s’ouvrir à Paris des “boutiques de caffé” tenues par des Arméniens, mais elles ne prospèrent guère. On imagine alors de porter le café à domicile comme cela se fait pour le thé à Londres. Sans plus de succès. Il faut attendre 1686 et la reprise d’un café par le sicilien Procope (à Paris) pour voir apparaître l’ancêtre du Café parisien et français.